Un projet écrit et mis en scène par Alexis Fichet
Création au Théâtre du Cercle du 8 au 11 octobre 2015
Avec Lucile Delzenne, Bérengère Lebâcle, Mathieu Montanier, Marie Thomas
Lumière Florian Staub
La scénographie de Pops ! est constituée à 90% d'anciens spectacles. Il s'agit bien d'un recyclage.
La pièce Pops ! est le résultat d'un ensemble de lectures et de courts chantiers menés depuis 2013, auxquels ont participé Karine Piveteau, Florian Pourrias, Marina Keltchewsky ainsi que Bérengère Lebâcle, Mathieu Montanier et Marie Thomas. Les quatre comédiens de la création sont Lucile Delzenne, Bérengère Lebâcle, Mathieu Montanier et Marie Thomas.
La pièce a été sélectionnée par le comité de lecture du Rond-point et mis en lecture par l'auteur au Théâtre du Rond-Point le 25 novembre 2014, dans le cadre des Piste d'envol.
Pops ! a également été sélectionnée par le comité de lecture du CDN d'Orléans et par les élèves du conservatoire d'Orléans. Elle a été mise en lecture par Fabrice Pruvost au CDN d'Orléans dans le cadre d'un travail avec les élèves du conservatoire les 23 et 24 janvier 2015.
Synopsis
Pops ! commence par finir : une maquette de pièce vient d'être jouée par trois actrices devant le conseiller d'une fondation qui peut, ou non, financer le projet. Ce à quoi nous allons assister, c'est à la discussion qui suit. Les quatre interprètes vont donc débattre de la pièce que nous n'avons pas vue. Mais des indices sont disséminés dans la conversation qui font que le spectateur commence à imaginer : les trois actrices jouaient plus ou moins les trois sorcières de Macbeth, et la pièce traitait de prédiction, de pollution et de catastrophes naturelles. Elles se transformaient aussi en calmar ou en crabe, par moments...
Il y a débat sur la nature de la représentation, sur la manière de traiter le propos, sur l'ironie. Les trois actrices défendent sérieusement l'idée que la pollution est une manière pour le monde extérieur de rentrer en nous, et qu'il faut accepter cette idée avec bonheur, ce que le conseiller refuse d'admettre. Il refuse l'idée de financer ce projet, qu'il juge indécent, et même ignoble.
Pendant la discussion, le décor, derrière eux, est démonté. Quand tout a été démonté et discuté, il ne reste rien au plateau que les quatre protagonistes. De tout ce qui a été dit et débattu, il ne reste pas d'autres traces que ce que le spectateur retiendra. Le propos sur la façon dont notre environnement nous contamine se double d'une réflexion sur le langage et l'art, la manière dont ils peuvent nous contaminer, trouver une place en nous.
Clip
Le spectacle de Pops ! commence par une chanson, qui est la fin du spectacle que vient voir le conseiller. De cette chanson a été tiré le clip ci-dessous :
Extrait
Amoco. — ça ne sert à rien de discuter...
Le conseiller de la fondation. — Provoc, du début à la fin... Votre joie, c’est de l’inconséquence.
L’Aquila. — C’est une proposition artistique ! Tant mieux si ça vous choque, tant mieux si ça vous remue un peu !
Le conseiller de la fondation. — C’est incohérent !
Amoco. (à L’Aquila) — Tant mieux ? Mais même pas... Il veut juste montrer son pouvoir, il va faire son rapport, et ils ne vont pas nous aider, et on va se galérer pour essayer de produire cette pièce...
Le conseiller de la fondation. — Vous n’assumez pas ! Vous voulez des cadavres et de la rigolade ! Et vous voudriez qu’on finance ça !?
L’Aquila. — Cette pièce vous dérange alors vous préférez ne pas la voir.
Amoco. (Virulente) — Ce qui vous rassure, c’est le mensonge et la tristesse. Vous voulez y rester, vous voulez rester avec vos affects tristes de dominants, avec son petit pouvoir, son petit pouvoir à faire subir à des gens qui travaillent, sans qui vous n’existeriez même pas, et vous êtes là, à ne rien comprendre, à refuser toute proposition novatrice. ça a changé quelque chose, depuis cinquante ans, de pleurer les morts du cancer et du nucléaire ? Elle existe encore, quelque part, la nature, la nature pure, avec de l’eau potable dans les ruisseaux, et de la bouffe saine pour tout le monde ? C’est où ? C’est où ? C’est où la pureté ? ça a jamais existé. Il ne suffit pas de pleurer. C’est pas une vitre, la planète, il suffit pas de faire pshitt pshitt et de passer le chiffon, et ça sera tout net, tout propre, comme si ça avait jamais servi. ça a bien servi. ça a bien servi, ça a bien été mélangé, sali, pollué, remélangé, humanisé. On va faire quoi ? On va pas nettoyer, vous le savez, qu’on va pas nettoyer. On peut pas.
(Silence)
Fukushima. (Très calme) — Alors, oui, nous faisons cette proposition, d’essayer de jouir de ce qui rentre en nous, d’essayer de considérer notre rapport à la planète sous un nouveau jour. Essayer de considérer avec joie que nous sommes sur la Terre, et que la Terre est en nous. Que nous sommes infiniment Terriens. Joyeusement Terriens.
(Silence)
Le conseiller de la fondation.— J’arrive pas à croire que vous disiez des choses comme ça. J’arrive pas à croire que vous y croyez.
Après coup...
(Tirée de HARAWAY Donna, Manifeste Cyborg, Exils éditeurs, 2007)
L'écriture constitue de façon prééminente la technologie des cyborgs, surfaces gravées de la fin du XXème siècle. La politique cyborg lutte pour le langage, elle lutte contre la communication parfaite, contre ce code unique qui traduit parfaitement chaque signification, dogme central du phallogocentrisme. Voilà pourquoi la politique cyborgienne insiste sur le bruit, défend la pollution, et se réjouit des fusions illégitimes entre l'animal et la machine. Ces accouplements rendent l'Homme et la Femme problématiques, ils subvertissent la structure du désir, force conçue pour générer le langage et le genre, et subvertissent ainsi la structure et les modes de reproduction de l'identité "occidentale", de la nature et de la culture, du miroir et de l'œil, de l'esclave et du maître, du corps et de l'esprit.
photos : Marine Uguen